Au cours de la grossesse, le corps de la femme est sujet à de nombreux changements, à la fois physiques et psychologiques. Parmi eux, il y a la fréquence cardiaque qui varie et devient plus élevée que d’habitude. Ainsi, en fonction de son état de santé, il est courant que la femme enceinte observe une augmentation de 10 ou 20 battements par minute. Généralement, la tachycardie est orthostatique lorsque vous êtes en enceinte. Ceci reste tout à fait bénin, mais il est important d’informer votre médecin soignant en cas d’épisode de tachycardie. Comment la grossesse peut-elle occasionner ou aggraver les troubles du rythme cardiaque ? Quels sont les traitements à appliquer ?
Sommaire
Pourquoi le rythme cardiaque augmente-t-il pendant la grossesse ?
Pendant la grossesse, on assiste à un perpétuel accroissement de l’utérus, du placenta et du fœtus. De ce fait, ils ont besoin de plus de sang pour garantir le processus de transformation croissante. On remarque donc une augmentation de près de 50 % du volume sanguin de même que le volume télédiastolique. La tension artérielle diminue du fait de la vasodilatation systémique (liée aux œstrogènes et au facteur natriurétique cardiaque). Le rythme cardiaque augmente de 30 à 45 % à la dixième semaine faisant accroître le stress et l’anxiété. Ces changements se manifestent dès le premier trimestre et deviennent maximaux au milieu de la grossesse. Ils évoluent au cours de l’accouchement et les modifications du volume plasmatique redeviennent normales 6 à 8 semaines après l’accouchement. Toutefois, d’autres raisons occasionnent aussi une augmentation des pulsations cardiaques pendant la grossesse.
Parmi elles :
- Les changements circulatoires : la grossesse provoque des modifications au niveau de la circulation sanguine générale, notamment sur le flux sanguin.
- Les changements hormonaux : ils sont en particulier visibles au cours de la grossesse et affectent le tonus des vaisseaux sanguins.
- La respiration : au cours de la grossesse, la femme inspire et expire plus d’air qu’habituellement.
- La prise de poids : la prise de quelques kilos lors de la grossesse provoque une légère augmentation du nombre de battements cardiaques chez la femme.
- Les hormones thyroïdiennes : on assiste à l’augmentation de leur sécrétion durant la grossesse. Cela entraîne également une élévation de la fréquence cardiaque.
Quels sont les préalables avant tout traitement à administrer au cours de la grossesse ?
Avant tout traitement, il est indispensable de déterminer la nature des troubles du rythme, en réalisant principalement un Holter ECG : des électrodes sont placées à la poitrine et aux bras pour déterminer les signaux électriques cardiaques. Quelquefois, un test d’électrophysiologie, à l’aide de cathéter et d’électrodes, peut être utilisé pour affiner le diagnostic. Suivant la cause de la tachycardie, différents traitements sont réalisables. Le médecin traitant peut par exemple vous enseigner une manœuvre vagale à effectuer en cas de crise ou prescrire des médicaments antiarythmiques. Étant donné que tous les antiarythmiques traversent la barrière placentaire et entrent dans le lait, leur utilisation doit donc être limitée. Les risques tératogènes sont au maximum durant les deux premiers mois de la grossesse. Le traitement à prescrire reste conforme à celui des traitements des femmes non enceintes tout en ayant à l’esprit l’effet des risques tératogènes lors des deux premiers mois. Les effets des médicaments changent au cours de la grossesse en raison des changements de l’absorption digestive et de la biodisponibilité. La concentration plasmatique chez la mère n’est pas reliée aux effets thérapeutiques ou toxiques. Les interventions chirurgicales restent alors réservées aux cas les plus sévères.
Traitement à administrer au moment de la crise
Les traitements sont fonction des différents types de tachycardie :
En cas de tachycardie jonctionnelle
Les pratiques vagales doivent d’abord être essayées. En cas d’échec, il faut faire l’injection de triphosadédine. Si la crise continue toujours, il est conseillé d’effectuer l’injection de métoprolol. L’on peut aussi utiliser le vérapamil, mais de façon prudente pour éviter les risques de bradycardie maternelle et fœtale. De même, il est contre-indiqué dans les préexcitations ventriculaires. Si la tachycardie ne s’arrête toujours pas, il faut éviter d’effectuer une stimulation auriculaire transœsophagienne dans les centres qui la pratiquent.
En cas de tachycardie ventriculaire bien tolérée
Dans ce cas, la lidocaïne peut être prescrite de même que le sulfate de magnésium. En cas d’échec, il est possible de faire une stimulation endocavitaire ventriculaire en limitant la radioscopie, par l’utilisation de l’échographie pour mettre le cathéter tout en protégeant le ventre par un tablier plombé. Si la tachycardie n’est pas bien tolérée, la cardioversion électrique devient essentielle. Elle est sans risque pour le seuil fibrillatoire du fœtus, mais certains spécialistes conseillent de surveiller le rythme fœtal.
En cas de tachycardie auriculaire ou de fibrillation auriculaire
Il est important de penser au risque thromboembolique. Dans l’arythmie de moins de 48 heures, il faut essayer un traitement par héparine ou par héparine de bas poids moléculaire (HBPM) pour cadrer la régularisation spontanée ou médicamenteuse. En cas d’arythmie de plus de 48 heures ou quand la durée est inconnue, les patientes sans cardiopathie et sans facteurs de risque thromboembolique auront un faible risque d’accidents thromboemboliques. Elles n’ont donc pas besoin d’anti-coagulation ni de thérapie anti-plaquettaire au cours de la grossesse. Les anticoagulants, à l’exception du dabigatran, sont propices. La warfarine doit être changée par une héparine non fractionnée (HNF) ou par une héparine de bas poids moléculaire au cours du premier et du dernier trimestre de la grossesse. Après, on pourra procéder à la tentative de régularisation de l’arythmie.
En cas d’arythmie récente chez une patiente sans cardiopathie
La régularisation pharmacologique peut se faire par la flécaïnide i.v., l’amiodarone i. v. est utilisée seulement quand ces traitements ont échoué et à la dose minimale efficace. Devant toute arythmie, le contrôle de la fréquence cardiaque doit s’effectuer en faisant usage du digitalique i.v., sauf si la patiente souffre d’un syndrome de Wolff-ParkinsonWhite. Si tous les traitements précédents échouent, l’on pourra utiliser le vérapamil. Le diltiazem est déconseillé, car il peut être dangereux pour le fœtus. Une cardioversion électrique doit être réalisée en cas d’instabilité hémodynamique. En cas de tachycardie auriculaire ou de flutter auriculaire, on peut essayer une réduction par stimulation transœsophagienne.